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vendredi 14 février 2014

LM trop les excuses de Benjamin Chaud

Surtout quand lesdites excuses justifient le fait qu'on n'a pas fait ses devoirs. Parce que oui, il y a plein d'écoles qui donnent plein de devoirs à faire. Mais il y en a aussi qui n'en donnent pas, parce qu'elles estiment qu'il y a le temps pour l'école et le temps pour la maison. Même que tous les parents n'aiment pas cette espèce d'observation, alors que la romancière jeunesse Marie-Aude Murail l'a toujours  justifiée. A l'oral et à l'écrit.

Ainsi, dans "Qui a peur de Madame Lacriz?" (L'école des loisirs, Mouche, 1996, épuisé), parfait pour les lecteurs débutants, la romancière jeunesse donne l'impression de régler ses comptes avec l'école. "Absolument", me confirmait-elle au moment de la parution du livre. "En tant qu'écrivain pour la jeunesse, je veux apporter ma part dans un débat de société. J'ai des choses à dire sur les mœurs scolaires: quand on a fait sa journée à l'école, est-ce fini ou faut-il faire une deuxième journée d'école à la maison?" A son sens, cette question renforce l'inégalité entre les enfants: "Mon petit garçon avait, l'an dernier, un copain beur dont les parents étaient analphabètes. Quand l'institutrice demande de trouver des illustrations sur la différence entre l'art roman et l'art gothique [fait repris dans le roman], je ne vois pas bien comment la maman de Loumir va s'y prendre. Parler d'une école égalitaire, c'est se ficher de la tête des gens: les devoirs à la maison renforcent l'inégalité."

Mais bon puisque les écoles donnent donc souvent des devoirs à faire à la maison, cela nous permet de savourer le nouvel album de Davide Cali et Benjamin Chaud, "Je n'ai pas fait mes devoirs parce que..." (Hélium, 44 pages). Un moyen format plus que croquignolet où, ouf, personne n'est à poil et où il n'est pas question de genre.
Heureusement qu'un certain JFC ne l'a pas encore lu. Ne pas faire ses devoirs! Cette incitation à la rébellion scolaire ne devrait-elle pas être condamnée? Le jour où lui et ceux de son espèce comprendront qu'il vaut mieux vivre des aventures ou des expériences par procuration dans un livre plutôt que dans la vraie vie, la littérature de jeunesse tournera sans doute de nouveau rond.

L'histoire commence...
 En attendant le verdict présidentiel, même si JFC ne préside qu'un parti, ne boudons pas notre plaisir. Car si "Je n'ai pas fait mes devoirs parce que..." est un catalogue exquis d'excuses plus abracadabrantes les unes que les autres, celles que présente successivement le héros à sa maîtresse de classe, l'album est plus qu'une imagination chauffée à blanc. Il joue habilement avec mille situations bien connues des enfants, ou des parents, il s'amuse avec les mots et tous ces faits que rapportent constamment les médias... Jusqu'à la finale qui nous ramène au début de l'histoire.

C'est comme si Davide Cali et Benjamin Chaud s'étaient livrés à un concours d'inventivité. Textes et images nous emportent dans un tourbillon de situations les plus folles les unes que les autres, et pourtant tellement logiques, partant la plupart du temps du quotidien des enfants. Même qu'on pourrait trouver un air de bienvenu marabout-bout-de-ficelle aux pages de leur album.

Tout commence quand la maîtresse dit: "Dis-moi, pourquoi n'as-tu pas fait tes devoirs?" Ensuite, c'est le déluge: un avion plein de singes qui atterrit dans le jardin, le robot qui détruit le jardin, les elfes qui cachent les crayons... Et ce n'est que le début de cette folle envolée délirante où un aimable teckel surgit dans chaque dessin tandis que Chaussette, le lapin héros de Benjamin Chaud, fait aussi une apparition.

Chien et chat sont convoqués.

Vraiment, "Je n'ai pas fait mes devoirs parce que..." est bien plus que l'aimable fantaisie qu'il paraît être au premier abord. Il est aussi un constat sociologique sur le mode humoristique de l'état des interrogations de nos familles, de la soucoupe volante aux Vikings, en passant par les reptiles géants, l'inquiétant sirop pour la toux et la machine-à-faire les devoirs. Plein d'autres trouvailles encore que je vous laisse le soin de découvrir dans les impeccables dessins de Benjamin Chaud, visiblement à l'aise dans tous les formats.

Juste encore une excuse pour le plaisir, quand un manchot égaré oblige le narrateur à le raccompagner au pôle Nord, ce qui est bien entendu une erreur puisque les manchots vivent au pôle Sud, mais a rendu le voyage encore plus long!

Pôle Nord? Oui? Non! Pôle Sud alors.




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